vendredi 28 septembre 2007

Locked-Out

Ce blog est tout neuf, je n'ai (pas encore mais plus pour longtemps) cours, la météo a subitement décidé de redevenir écossaise ; conclusion, je m'ennuie, et je m'empresse de venir raconter ma vie ici. Commençons par la narration de mon petit traumatisme matinal, qui servira de prétexet à une petite description de mon cadre de vie, i.e. de mon 'tit appart universitaire là haut tout en haut sur la colline.
Ce matin donc, à 8h précises, mon réveil se manifeste dans une vaine tentative de me faire quitter ma confortable couette. Malheureusement pour moi, il est assisté dans cette tâche par l'homologue de la chambre d'en face, qui émet un désagréable mais imperturbable "tûûût tûûût" (la locataire de chambre d'en face ne doit pas y être, dans sa chambre, sans quoi elle aurait déjà arrêté cette horreur). Bref, tant bien que mal, je m'extrait de mon lit puis des 10m2 qui me servent de chambre. La porte se referme derrière moi. Sauf que, malheur, mes clés ne sont pas du même côté de la porte que moi. Ca devait arriver, un jour où l'autre... mais ça ne rend pas le trajet en chemise de nuit, dans le froid matinal, jusqu'au Village Office pour demander une clé de rechange plus agréable.

Car oui, le problème d'un campus, c'est qu'il vaut mieux que ce soit sécurisé, et que la meilleur façon de sécuriser est encore de mettre des verrous aux portes. Les dites portes sont en plus de ça des portes coupe-feu, qu'il est quasiment impossible de maintenir ouvertes... à moins d'avoir pensé à bloquer le verrou, mieux vaut donc penser à prendre ses clés quand on sort, surtout que chacun n'a droit qu'à trois enfermements dehors sans réprimandes. Les portes, donc, sont le premier et principal inconvénient du logement on-campus. En cherchant un peu, on peut dresser une listes d'inconvenances secondaires : les murs peints en bleus, on ne sait pourquoi, les cris dehors jusqu'à 2h du matin, le bruit incessant des voitures, la cuisine dépourvue de toute ustensiles lorsqu'on arrive... Mais, soyons honnête, ces détails mis à part, on est loin de l'inconfort : c'est propre, fonctionnel, avec une baie vitrée donnant sur un jardin dans le salon, et le campus est rempli de verdure et d'arbres (avec même un petit ruisseau), ce qui, en plein centre ville, est appréciable.

Quant à la population du campus, elle se divise entre les freshers écossais, reconnaissables à l'amas de bouteilles de bières dans la cuisine, et les étudiants étrangers, reconnaissables à l'absence d'accent écossais. Chez moi, il y a deux étages d'écossais, deux étages d'étrangères, et un joli mis sur mon étage... Présentation, par ordre d'arrivée (j'ai pas de photos, pour l'instant, j'actualiserai en temps voulu).

• Barbara, Canadienne, en troisième année de Civil Engineering, arrivée un peu avant moi. Elle vient de Kingston, entre Toronto et Montréal, et a vécu 3 ans au Québec, donc comprend le français (et est capable de le parler, même si elle ne le fait pas).
• Puisan, Malaisienne, en troisième année d'Architecture, arrivée le même soir que moi mais censée rester à Glasgow pour trois ans, le temps d'obtenir son diplôme.
• Caroline, Américaine (du Massachussets), là pour un semestre à la Faculty of Education, section sport - jure tous les soirs qu'elle n'ira pas aux soirées des freshers, avant de finalement s'éclipser pour s'y rendre, et de découcher, en oubliant de désativer le réveil...
• Eva, Espagnole de 25 ans, elle aussi en Engineering pour l'année.
• Enfin, Martina, Tchèque, future architecte n°2, arrivée bonne dernière mercredi soir.

... ou un petit échantillon du bouillon de nationalités qui mijote à Strathclyde, savamment réparti de façon à éviter les grumeaux nationaux. C'est aussi un excellent moyen d'éviter d'atraper l'accent écossais trop vite, ce qui n'est pas forcément un mal...
Il paraît que le campus est rempli de français, et mon oreille me dit que c'est probablement vrai, à force d'entendre des phrases ou des accents indubitablement gaulois ; toujours est-il que pour l'instant, je ne suis pas allée tellement au-delà du "ah tiens! ceux-là sont français!", et de toute façon, je préfère attraper un accent écossais, américain ou malaisien, que renforcer la part d'accentuation à la française dans mes phrases anglaises.

jeudi 27 septembre 2007

Inauguration


Bien. Sixième jour à Glasgow, il est plus que temps de commencer cette chose, avant qu'il y ait trop de choses à raconter pour que cela puisse y tenir. Donc, sixième jour dans la contrée du grand Robert Burns, que je ne manque pas de saluer à chaque fois que je passe devant sa statue sur George Square (c'est-à-dire, souvent - aujourd'hui d'ailleurs le pauvre monsieur était importuné par des camions et des stands estampillés "Ratatouille", et ça n'avait pas l'air de le réjouir). Les pigeons en tout cas ne l'épargnent guère plus que le pauvre Diderot du boulevard Saint Germain : à George Square ou à Saint Germain, les écrivains statufiés des grandes villes sont apparemment condamnés à porter la perruque blanche - c'était bien la peine de passer à la postérité. Le bon vieux Robert en peut même pas se consoler en invoquant l'originalité, parce que l'originalité en terme de couvre-chef, à Glasgow, c'est déjà pris par Wellington (domicilié sur St Vincent Square, la place d'à côté), qui, fort avisé, a décidé une nuit que, pour se protéger des pluies de fientes, il porterait désormais un cône d'autoroute (enfin, un machin conique à rayures rouges et blanches). Robert a donc toutes les raisons d'être triste, et du coup, on ne l'entend pas chanter Auld Lang Syne en choeur avec ses colocataires (ils sont beaucoup, les statufiés de George Square).


De temps en temps passe une mystérieuse limousine rose bonbon, qui dépose un groupe d'enfants devant l'imposante bâtisse qui trône sur la place, et qu'on a tout le temps d'admirer en attendant que le feu pour les voitures passe au rouge, ou que celui pour les piétons passe au vert, ou qu'il se passe quelque chose qui permette de traverser la rue sans (trop) de danger. Car oui, traverser les rues en Ecosse est un art difficile, que l'on ne maîtrise pas en dix minutes ni même en six jours, d'ailleurs. Au traversage de rues s'ajoute l'escaladage de collines et d'escaliers, car Glasgow n'est, hélàs ou heureusement, c'est selon, pas une ville plate - ah mais alors, pas du tout! Et on s'en rend tout particulièrement compte quand on habite en haut d'une colline, au troisième étage qui plus est. Alors, oui, Glasgow est une ville d'aventuriers, peuplée d'autochtones à l'accent improbable, que certains (présentement, les freshers de 17-18 ans, amateurs de bière et de sorties nocturnes) s'évertuent à faire entendre à la ronde (fierté nationale, quand tu nous tient) après l'avoir savamment imbibé d'alcool - de préférence la nuit, pour imiter les loups, sauf que les loups ne roulent pas les r de leur bière.

Ceci dit, on a beau dire, si les racontards sur l'accent et l'alcool sont, il faut le reconnaître, assez véridiques, tout ce qu'on raconte sur Glasgow n'a pas cette chance : Glasgow n'est pas une ville moche, et Glasgow n'est pas (encore) une ville humide. Il n'y fait même pas si gris que ça (enfin, au moment où j'écris ces lignes, si, mais c'est bien la première fois en trois jours), il n'y pleut (pour l'instant) pas tant que ça, et le temps est de toute façon tellement capricieux que si nuages il y a, on est parfaitement en droit d'espérer qu'ils se crapahutent aux antipodes en un quart d'heure. C'est d'ailleurs souvent ce qu'ils font, peut-être parce qu'ils en ont marre de Glasgow, même si je le répète Glasgow n'est pas moche. Glasgow est un foutoir de bâtiments de toutes les tailles, de toutes les formes, de tous les âges et de toutes les couleurs (avec une forte dominante grise et rouge), amoncellés entre des grandes artères rectiligne dans le centre, moins alignés quand on se dirige vers la périphérie. Un peu comme le temps, le paysage a une forte inclinaison à changer du tout au tout en quelques minutes, une rue un peu glauque remplie de bazars et de "pound store" peut donc déboucher sur une tour en pierre grise abritant une horloge bleue et or, à côté du marché couvert et d'un des trois soi-disant "plus vieux pubs de Glasgow". L'affluence elle aussi varie fortement : de la foule du milieu d'après-midi, on passe vite au vide du début de soirée, le temps pour chacun de rentre chez soi s'installer devant un repas, avant d'aller s'abriter dans un des nombreux pubs qui bordent les rues...